Camille Claudel : avortement

Comment savoir si Camille Claudel a avorté ?

Rien de tangible n’autorise à affirmer que Camille Claudel s'est fait avorter, mais nous disposons de quelques lettres et d'éléments biographiques qui nous permettent de déduire que la maîtresse d'Auguste Rodin a eu recours à  l'avortement. Ces indices, les voici :

• Paul Claudel écrit à une amie qu'une personne qui lui est proche répond de ses péchés en étant enfermée dans un asile depuis 26 ans. Il précise même qu'il s'agit d'un avortement qu'il compare à un crime. 
• Durant leur relation, on sait qu'Auguste Rodin s'est renseigné discrètement à deux reprises auprès de ses relations pour mener à bien des avortements clandestins. Le séjour de Camille au château de l'Islette sans Rodin ressemble d'ailleurs aux conditions d'une convalescence. Un château où les deux amants vécurent des moments intimes et créatifs. Un château où Camille Claudel réalisa un buste appelé La Petite Châtelaine qui représentait la petite fille des propriétaires. Un buste plusieurs fois décliné dans des versions possédant chacune leur expression. Une sculpture qui fit dire à Mathias Morhardt : « Cette Jeanne enfant prouve que Mademoiselle Camille Claudel est désormais un maître ».
• La question de l'avortement prend un sens tragique lorsque l'on sait qu'à l'asile Camille refusait qu'on lui prépare à manger, prétextant sa crainte de se faire empoisonner. Il s'agit là d'un réflexe déjà analysé chez les femmes ayant subi des viols ou des avortements successifs : la semence masculine étant perçue inconsciemment comme étant aussi nocive qu'un poisson. 
• Il est intéressant de savoir qu'Auguste Rodin a refusé de reconnaître le seul fils qu'il a eu avec sa compagne Rose Beuret. Le garçon, qui portera le nom de sa mère, travaillera un temps dans les ateliers de son père, avant de s'éloigner d'un homme qui lui refusera son amour et son soutien moral. On comprend alors mieux son refus d'être le père d'un enfant de Camille. 

Camille Claudel a-t-elle eu des enfants ?

Le seul moyen de savoir si Camille Claudel a donné naissance à des enfants consiste à lire sa correspondance, notamment celle qui concerne sa relation avec Auguste Rodin. Ainsi, en octobre 1886, Auguste Rodin s’engage par écrit qu’il épousera « Mlle Camille Claudel » et qu’il la protégera par tous les moyens. Il précise « qu’au mois de mai » il n’aura plus aucune femme... Cet engagement ne sera pas respecté ce qui, venant de la part d’un homme qui épousé sa vieille compagne Rose Beuret à quelques mois de mourir, et venant d’un père qui ne reconnu pas l’enfant qui naquit de cette relation, n’est pas étonnant. 

Château de l’Islette - Azay-le-Rideau

C’est dans le cadre romantique du Château de l’Islette, situé à plus de trois heures en voiture de Paris, qu’Auguste Rodin et Camille Claudel choisirent de profiter de la discrétion des lieux pour mieux profiter de leur passion amoureuse. C’est également dans ce cadre bucolique que Camille Claudel réalisa l’une de ses sculptures les plus émouvantes (en l’occurrence La petite Châtelaine). Et c’est également au cœur de la Touraine, au sein d’une nature protégée par les bras de l’Indre, que Camille Claudel aurait profité de quelques jours de repos pour se remettre psychologiquement et physiquement des affres d’un avortement forcément perturbant. La lettre écrite par Camille Claudel en 1893, deux avant la rupture définitive entre elle et Rodin, exprime une réalité tronquée de quelques précisions, et qui laisse penser que l’alitement dont elle parle doit rester connu de peu de personnes. Camille écrit à Rodin : « J’étais absente lorsque vous êtes venu, car mon père est arrivé hier, j’ai été dîner et coucher chez nous. Comme santé, je ne vais pas mieux car je ne peux rester couchée... Mlle Vaissier est venue me voir et m’a raconté toutes sortes de fables forgées sur moi à l’Islette... » Il faut compléter cette lettre de celle envoyée par Camille à son frère Paul Claudel, en décembre 1893, dans laquelle elle dessine une jeune-fille accroupie sur un banc, et qui pleure devant ses parents qui la regardent sans comprendre. Le dessin est intitulé « la faute » et semble laisser deviner un avortement récent, et non la naissance d’un enfant. Complétons le tableau des coulisses d’une relation sentimentale peu apaisante par le contenu de la lettre de Paul Claudel adressée à Marie Romain-Rolland, en date du 27 décembre 1939, et dans laquelle il écrit : « Une personne dont je suis très proche a commis le même crime que vous et qu’elle l’expie depuis 26 ans dans une maison de fous... »

Conclusion